
Une expo pour donner un visage à l’immigration
Une des expositions, que nous avons visitée ce 6 septembre avec le groupe de l’Option Média du lycée Théodore Aubanel d’Avignon, dans le cadre des « Rencontres de la Photographie », est la raison de notre article aujourd’hui.
Plus précisément, cette exposition est « un état de conscience » et une « histoire individuelle au Pluriel ».
L’exposition, montée à partir des photographies du « Studio Rex », studio de photos aujourd’hui fermé, est un hommage au quartier de Belsunce, connu comme un quartier multiculturel, à l’image de Marseille.
Nous avons fait la rencontre d’un homme passionné et engagé, Jean-Marie Donat, Commissaire de cette exposition. Il nous a immergé dans son monde et dans son travail, ici une rencontre avec des photos anonymes et mystérieuses au premier abord.
Un commissaire d’exposition qui a su trouver les mots pour nous convaincre de son projet. Qu’expose-t-il ? Des archives de photos, des portraits de personnes en quantité astronomique. Cet homme en a tellement qu’il n’a pu nous en donner le nombre exact. Au premier abord, cela peut paraître étrange. Conserver des photos de personnes inconnues pour lui, et en grande quantité … On se demande bien pourquoi ? Nous sommes passés par cette étape, et même bien au-delà… Laissez-nous désormais vous convaincre !
« Ce riche fonds photographique » comme il le nomme, est un trésor à ses yeux. Un trésor pourtant anonyme, puisqu’il n’y reste ni nom, ni date précise.
C’est donc, lors de cette exposition que nous distinguons trois sortes de portraits. Contenant tous des visages sérieux, pris en photo pour des raisons solennelles. Laissez-nous vous en décrire quelques-unes :
« Donner vie à deux portraits en les unissant de manière plus harmonieuse, afin de combler le vide d’une présence qui ne l’est plus à nos côtés, ou d’un souhait qui n’a pu être réalisé. » C’est ce qu’on surnomme : les photos montages voulus par les commanditaires de ces photos, pour être envoyées dans leur pays d’origine, pour montrer à leur famille, leurs joies, leur réussite.
« Venir dans son meilleur costume (traditionnel ou non), dans un but de laisser une trace de vie, d’annoncer à distance que la famille s’est agrandie, s’est enrichie et vit mieux », c’est ce que l’on intitule : les photos de studio
« Garder un souvenir, l’amour d’un père, d’une mère, d’un enfant, d’un ami et de tous ceux qui occupent nos pensées encore. Afin de se remémorer les souvenirs, de vouloir ouvrir son portefeuille pour une tout autre raison plus importante, de se rappeler d’où l’on vient, que ce passé a fait notre présent et que le temps nous file inéluctablement entre les mains tels des grains de sable », c‘est ce que l’on nomme : les photos portefeuilles.
« Et enfin, permettre à des immigrés de toute civilisation de se laisser saisir l’âme le temps d’un instant, sous trois types de portraits, afin de transmettre aux personnes qu’ils aiment ne serait-ce qu’un « Ne m’oublie pas, je suis en vie » à travers une photographie. C’est ce que j’appelle M. Keussayan, photographe au Studio Rex, un messager. Et de l’action que ce dernier a fait à l’infini, il en est résulté des fragments de moments qui n’ont lieu qu’une fois. »

M. Keussayan père
De ces photos, nous n’en sommes pas les destinataires. Elles se trouvent pourtant dans cette exposition malgré elles ou par le fruit des hasards de l’Histoire, de leurs histoires (non réclamées par leurs commanditaires, tirages à partir des négatifs stockés au Studio Rex pour beaucoup d’entre elles). Et c’est en prenant le temps de s’interroger sur la volonté de leurs commanditaire de se faire prendre en photo, et sur ce qu’on ressentirait si c’était NOS familles, NOS êtres chers sur ces photographies qu’on passe d’une impression étrange à une impression de Vie devant elles.
Tout au long de ses portraits, il s’agissait de de toucher l’humain à travers les messages qui s’y cachaient. « C’est une littérature de l’œil, et non de mots ». Et aujourd’hui, comprendre cela au-delà de ce que l’on peur parfois entendre sur les immigrés, « c’est (selon Jean-Marie Donat) redonner vie à toutes ces âmes ».
Sakîna, Oumaïma, Rime, septembre 2023.
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